Le quartier de Bougsemtenga

Le quartier de Bougsemtenga

L’histoire du quartier et des Récréâtrales

L’origine du nom du quartier est Bouktenga, auquel sont associés deux significations. Premièrement, bougtenga signifie littéralement en mooré « le quartier du bonheur ». Lors de l’installation des premiers habitants venus du village de Manga (situé au Centre-Sud du Burkina Faso), le Chef du royaume –le Mogho Naaba – avait exigé que ses hôtes soient accueillis dans un « endroit paisible ».

Deuxièmement, le nom du quartier renvoie à la notion de boudtenga, « terre de justice », puisque c’est de ce quartier que provenaient toutes les décisions de justice du royaume. Le quartier Bougsemtenga est l’un des premiers lieux d’habitation de la ville de Ouagadougou. Ancien quartier, son histoire raconte l’organisation sociale, politique et culturelle du royaume des mossé. Gounghin, district dans lequel se trouve Bougsemtenga, est connu comme étant le quartier des « Tapsoba » et représentait autrefois l’espace de localisation des guerriers du Mogho Naaba et de son Ministre de la Défense.

Aujourd’hui, le quartier Bougsemtenga dispose de quelques infrastructures à caractère économique, social et culturel. Sa population, jeune et cosmopolite, vit en grande partie des bénéfices qu’elle retire de ses activités artisanales et commerciales. Si les Récréâtrales ont vu le jour en 2002, ce n’est qu’en 2006 qu’elles s’installent définitivement dans le quartier populaire de Bougsemtenga. L’édition 2008 représente ainsi un véritable tournant dans l’évolution du festival car, pour la première fois, tout se déroule dans la rue 9.32. Surnommée depuis lors « la rue des Récréâtrales » par les participants et riverains, cette rue, qui se métamorphose périodiquement en théâtre à ciel ouvert, est aujourd’hui la marque de commerce du quartier.

Le quartier : un espace de participation et de redevabilité

L’équipe des Récréâtrales a fait de l’appropriation de la dynamique du projet par le quartier un de ses axes majeurs. Initialement, l’accent a été placé sur l’aménagement des espaces publics du quartier et d’un certain nombre de cours familiales transformées en lieux d’accueil pour le festival. Ce sont donc des familles du quartier qui reçoivent chez elles, durant la Plateforme festival, les espaces de représentation, ainsi que le public. Ce dispositif offre une opportunité inédite d’attirer devant les scènes les habitants du quartier qui ne constituent pas l’audience habituelle de la création théâtrale au Burkina Faso. A chaque édition, ils sont également mobilisés pour assurer l’intégralité de la logistique du festival : billetterie, accueil, restauration, propreté, appui technique, etc. Les Récréâtrales embauchent au total 400 personnes le temps du festival auxquelles elles distribuent, par le biais d’emplois valorisants, les bénéfices du festival. Au fil du temps, des projets structurants ont vu le jour pour renforcer les externalités positives de l’activité dans le quartier : un système d’écoulement des eaux de pluie dans les cours qui accueillent les spectateurs, un système de collecte et de traitement des déchets pour éviter que l’augmentation de la fréquentation des lieux n’impacte le niveau de pollution, le tout financé par les bénéfices du festival.

Après consultation des habitants du quartier et des autorités locales, il est apparu nécessaire de donner un cadre formel de concertation entre les Récréâtrales et les représentants des différentes composantes de la population du quartier. Ce cadre a pris la forme d’un comité de quartier initié en octobre 2011. Ce comité a pour mission essentielle de formuler des propositions fortes pour l’enracinement de l’activité dans le quartier, pour la maximisation des retombées positives pour l’environnement local et pour le renforcement du dialogue social et de la citoyenneté à travers le théâtre.

En particulier, la création du Théâtre des Récréâtrales en 2018 a offert aux habitants un espace d’expression et de participation artistiques au projet. Ainsi, ils sont mobilisés bien au-delà de l’organisation logistique et donnent sa véritable essence aux Récréâtrales.

Compagnonnage artistique des jeunes du quartier

C’est pour impliquer la jeunesse du quartier dans le volet artistique que les Récréâtrales ont mis en œuvre un compagnonnage artistique pour dix jeunes du quartier en 2019-2020 qui a abouti à la création du spectacle, Le Quartier, présenté dans le cadre de la onzième édition de la Plateforme Festival des Récréâtrales. Le spectacle a rencontré un énorme succès auprès du public et a bénéficié d’autres temps de diffusion.

Face au constat de l’engouement, de la créativité et du sérieux du groupe, l’accompagnement s’est poursuivi afin de contribuer à la professionnalisation des jeunes du quartier de Bougsemtenga via la formation au métier de comédien ou de danseur et la participation à des créations théâtrales ou multidisciplinaires professionnelles. Suite à la réalisation du projet Terre Ceinte hors Ouaga, d’autres jeunes de Kaya et de Tenkodogo sont venues rejoindre ce groupe.

Il s’agit de leur ouvrir des perspectives d’avenir professionnel au sein de leur pays, mais surtout de leur permettre de rêver et de faire travailler leurs imaginaires pour une meilleure estime d’eux-mêmes et de leur appartenance à leur environnement.

Programme de renforcement des capacités des femmes et création du spectacle d’ouverture du festival

Après plusieurs éditions des Récréâtrales dans le cadre desquelles une vingtaine de femmes de Bougsemtenga ont pris part à la création du spectacle d’ouverture de la Plateforme Festival, notre souhait est de poursuivre l’accompagnement à la pratique artistique de ces femmes en formulant un programme de formation qui leur soit dédié. Il s’agit de proposer un programme de formation qui prenne aussi en compte les problématiques de vie qu’elles peuvent rencontrer et qui leur apporte des solutions concrètes.

Ce programme se décline en deux volets:

  • Un volet artistique qui aboutira à la production du spectacle d’ouverture de la Plateforme festival des Récréâtrales ;
  • Un volet technique et artisanal pour que ces femmes soient également les créatrices des « objets dérivés souvenirs » vendus pendant le festival (totebags, tshirts, etc.).

Les ateliers artistiques proposent un module de formation en théâtre et un module en danse.

Les ateliers artistiques sont pensés pour les femmes bénéficiaires comme un lieu de réappropriation de leur corps et de leur esprit. Pour elles qui sont des mères, des épouses, des sœurs, des filles, ces ateliers seront l’espace où elles pourront prendre le temps de se penser et de se raconter aussi entant que femmes autonomes, avec des désirs, des choses à dire, des choses à soigner, des choses à partager avec d’autres femmes. Le théâtre et la danse les accompagneront dans ce processus.

Les ateliers d’apprentissage des techniques de tissage sont construits en partenariat avec l’Association pour la Protection de l’Enfance et la Promotion de la Femme (APEPF). Le projet part du constat que les femmes du quartier sont très dynamiques dans l’organisation et le bon déroulé du festival mais que leur participation se limite à des tâches peu valorisées (salubrité de la rue, entretien des maisons accueillant les artistes, restauration, etc.). Or, plusieurs d’entre elles savent tisser des étoffes mais n’ont malheureusement pas eu la chance d’être formées pour faire de leur savoir une pratique artisanale génératrice de revenus. Rappelons ici que le pagne Faso Dan Fani est un trésor de la culture burkinabé. A travers ce programme de formation, l’idée est qu’elles puissent désormais être impliquées dans la production d’objets et accessoires dérivés qui seront distribués et vendus aux partenaires, aux participants et aux festivaliers des Récréâtrales, et qu’elles en tirent directement bien sûr un revenu.

Ces ateliers se déclineront en quatre modules de formation :

  • – un module en développement personnel pour que les femmes prennent conscience de leurs capacités, de leur force et de leur potentiel, complétant ainsi le travail réalisé dans le cadre des ateliers artistiques ;
  • – Un module en tissage ;
  • – Un module en teinture écologique ;
  • – Un module en couture.

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